Chanteuse
du groupe Cirrus, la chanteuse de world-music, primée en 2008 du prix
Monte Carlo Doualiya à Alexandrie, va bénéficier d’ «une aide à la
création» et d’une campagne de promotion sur l’antenne de RMC Doualiya
(filiale de RFI). Une suite de concerts a été ensuite organisée afin de
la présenter aux médias et aux professionnels, dont celui qu’elle a
donné dans la capitale tunisienne. De père tunisien et de mère
française, Nawel Ben Kraïem a grandi en Tunisie, qu’elle a quittée
depuis environ huit ans pour rejoindre la France. En conservant sa
double nationalité, elle peut faire ce lien créatif entre Orient et
Occident. Un profil atypique qui lui permet avec son groupe Cirrus de
servir une musique métissée. Entre sonorités pop-rock contemporain,
musique orientale, influences folks, blues et méditerranéennes à la
croisée de deux univers , le spectacle auquel nous avons assisté
prétendait tout naturellement exceller dans le métissage des cultures.
Il faut dire que toute la force et le mystère de Cirrus est de
considérer l’art du métissage «comme une seconde nature». L’avons-nous
confirmé lors de leur passage tunisien? Pour ce spectacle, cinq
personnes investissent la scène entre lumières blanche, bleu, rouge et
jaune, le plateau se prêtant complètement à ce genre de manifestations.
Avec une moyenne d’âge qui ne dépasse pas la vingtaine d’années, quatre
musiciens et une chanteuse composent un groupe homogène: une guitare,
une basse, un violoncelle et une batterie. Et cette voix rauque et
suave qui, soudain, remplit les ondes du palais Kheïreddine, à la fois
solide par sa puissance et enrichie d’une résonance aérienne, la voix
de Nawel Ben Kraïem qui propose d’emblée un jargon musical particulier. La
chanteuse, accompagnée par son groupe, veut «annoncer le ton», et
instaurer cette manière désinvolte que la jeune scène musicale aime
s’approprier. Les mélodies occidentales se fondent dans des sonorités
balkaniques, le tout maintenu par des cordes (guitare, basse,
violoncelle) et les percussions. A bien des égards, le manque de réceptivité au public a laissé place à une ambiance indiscernable. Satisfait,
séduit, conquis ? Il est vrai que les applaudissements de l’assistance
n’ont pas suffi à trancher. C’est peut-être parce que la tendance du
groupe, clairement pluridisciplinaire, frôle parfois la confusion
sonore. A trop vouloir diversifier… Le chant en langues diverses (le
plus souvent en arabe ou en anglais, avec quelques titres en français)
résonne certes comme une invitation au voyage. Cependant, accompagné de
débordements sonores voulus, et de césures rythmiques, l’univers
musical de Cirrus semble seulement destiné à un public d’initiés. Leur
musique atypique soulève implicitement la question. Si à l’encontre
de ses influences musicales, Nawel qui chante en arabe, en anglais, en
français, n’a pas encore inventé sa propre langue, peut-être
devrait-elle justement se détacher de ce trop plein de lexiques pour
trouver sa véritable personnalité artistique qui, au demeurant, recèle
un souffle créatif hors du commun. Selima K. |